Les résidences croisées d’Olivier Laban-Mattei et de Serge Picard en Bretagne et en Corse cet automne sont le dernier volet de l’échange opéré entre le Centre Méditerranéen de la Photographie (Bastia) et l’Imagerie pendant l’année 2013 sous le titre Bretagne-Corse, allers-retours. Après une présentation à l’Imagerie au printemps d’œuvres de la collection du CMP (Rousse, Couturier, Fleischer, Nozolino, Mérian, Fontcuberta), c’est un aperçu de la Bretagne, à travers le fonds photographique de l’Imagerie, qu’ont pu découvrir cet été les visiteurs du Centre Culturel Una Volta de Bastia.
Pour clore cette année, ce sont les regards croisés d’un photographe corse sur la Bretagne et d’un breton sur la Corse qui s’offrent aux cimaises de l’Imagerie.Tous deux ont choisi de travailler sur la ruralité.
Olivier Laban-Mattei:
« Le Trégor rural »
Olivier Laban-Mattei a choisi de travailler sur le Trégor rural. A quelques encablures de Lannion, vers le sud, il a sillonné nos villages en septembre, avec l’aide de Jean-Pierre Guyader, agriculteur et animateur sur Radio Kreiz Breizh.
« Comment raconter de façon honnête et juste une terre inconnue, en une semaine à peine, quand ma propre terre continue de me surprendre chaque fois que j’y reviens ?
Comment éviter les clichés, les raccourcis, les contre-sens quand on ne connait rien de la culture et des traditions du pays qu’on visite pour la première fois!
C’est alors que l’innocence, la naïveté la curiosité du voyageur perdu croisent le chemin de la chance. Et il suffit souvent d’une rencontre, de la rencontre, pour qu’un exercice commandé se transforme en une véritable aventure humaine intense, profonde, inoubliable, dévoilant par là-même l’âme d’un peuple. Une terre doit son histoire aux hommes qui l’habitent. Le Trégor n’échappe pas a cette règle. On y retrouve ici, plus qu’ailleurs, le sens noble du mot « Paysan » qu’on s’attitre avec fierté , même parmi les plus jeunes. « Paysan-journaliste », « paysan-créateur », « paysan-conteur », ou simplement « paysan » parce que c’est déjà beaucoup , chaque habitant se décline ici dans toute sa richesse.
(Olivier Laban-Mattei)
Serge Picard:
« Niolu, 2013 »
La résidence de Serge Picard en Corse, menée en octobre 2013 dans le cadre d’un projet Écritures de lumière organisé par le CMP avec le soutien du Ministère de la Culture a eu lieu dans la région montagneuse du Niolu (Haute-Corse).
Travail personnel sur la ruralité et atelier pédagoqique avec les élèves de l’école primaire bilinque de Calacuccia étaient au programme du photographe.
« Je ne connaissais pas la Corse. Il est vrai que je n’ai pas été déçu, elle est magnifique. Mais cela a aussi été une énorme contrainte et un grand dilemme : comment photographier les paysages corses sans tomber dans la caricature de la belle carte postale. Finalement. c’est la météo qui m’ a aidé. Après quelques iours sous le soleil de Bastia et du Cap Corse. ie suis arrivé sur mon lieu de résidence, la région du Niolu région de haute montagne ou se trouvent les plus hauts sommets (2700 m). Je me suis retrouvé pendant 3 semaines dans la pluie, les nuages, le froid, le brouillard…avec parfois de magnifiques éclaircies.
Plus de carte postale, plus de tourisme de masse. Les villages, comme dans la plupart des régions françaises, semblent vides de leurs habitants. Volets clos, beaucoup de maisons à l’ abandon. Mais Marcel Fortini, directeur du CMP m’avait prévenu : «Ce n’est pas parce que tu ne vois personne que personne ne te voit .»
Il y avait donc encore des habitants dans ces villages? Puis, après réflexion, je me suis dit : mais oui, sinon qui s’occuperait de tous ces animaux qui y trainent, vaches, cochons, ânes, chèvres, moutons croisés à chaque coin de ruelle ou sur les routes sinueuses de montagnes.
C’est dans ce contexte que j’ai travaillé, en juxtaposant deux points de vue paysages et portraits d’habitants du Niolu chez eux. »
(Serge Picard)