À la suite de Guy Le Querrec dont l’œil incisif traçait à l’automne dernier le portrait de la Bretagne de nos parents et grands-parents, c’est le regard d’auteurs contemporains sur notre région qui fait l’objet des Estivales en 2017. Une région, ses femmes et ses hommes, ses architectures agricoles et industrielles, ses paysages traduisant la réalité des mutations humaines et économiques.
Après les paysages de sa Chine d’origine, remarqués au fil des festivals ces dernières années, du WorldPress à la baie de Saint-Brieuc, Zeng Nian a croisé lors de sa résidence en Bretagne durant l’hiver dernier et au printemps 2017, paysans, marins, artisans et ouvriers. Tous lui ont offert leur regard, un peu de leur temps et confié beaucoup de leur vie. Ses formats noir et blanc plus grands que nature rendent hommage, dans la précision et la vigueur de leurs détails, à la force et à la dignité de ces courageux et passionnés bretons, fiers, comme le dit le photographe, « de leur métier et de leur région ».
C’est aussi de courage qu’il est question chez Stéphane Lavoué. Dans de somptueux polyptyques alliant portraits et paysages, il fait l’éloge de ces hommes et femmes du pays bigouden qui, à terre, à la criée, dans les conserveries et les chantiers de réparation navale, font partie de cette grande confrérie des travailleurs de la mer au quotidien difficile, souvent au-delà de l’exigence.
Tout comme chez Stéphane Lavoué, l’empathie est grande chez Vincent Gouriou pour ses modèles dont il observe la différence au plus près de l’intime. Il sait se faire oublier, se fondre dans leur univers, aller au plus profond du regard et du corps. Sa lumière et sa colorimétrie retenue se font complices de ce refus des normes dans de longues poses patientes qui mènent au « lâcher-prise » dans lequel le photographe voit son « instant décisif ».
Dans une Bretagne agricole en profonde mutation, les usines de stockage et de production de nutrition animale rythment champs et bocages. Leurs silos monumentaux dominent prairies et talus. Laurent Bellec les documente patiemment et méthodiquement depuis plusieurs années, en Bretagne d’abord puis à travers le monde. Le noir et blanc de ses débuts ici présentés et qui n’étaient pas sans rappeler les typologies d’un fameux couple d’outre-Rhin a fait place à la couleur. L’Australie, le Brésil et le Japon ont succédé aux vallons costarmoricains mais la rigueur architecturale de ses prises de vue est toujours présente.
Tout aussi constante est la démarche de Philippe Caharel qui sillonne depuis des lustres la région, de village en village. Époques et styles se confrontent, le calvaire y côtoie le café et la croix le silo, le château le barnum, l’histoire le présent. Les photographies de Philippe Caharel, sont à l’image de cet « artiste du silence », pleines de retenue.
Vues de l’exposition